mardi 26 septembre 2023

Au Niger, Monsieur le Président de la République, ce n’est pas Trafalgar, mais Fachoda plus la Bérézina. Une fois encore bravo à ceux qui vous conseillent !!!

Je dois  reconnaître une erreur. Dans mon communiqué en date du 15 août  dernier concernant le fiasco  de l’Elysée au Niger, j’écrivais « aujourd’hui Trafalgar, demain Fachoda ». La réalité est autre puisqu’il s’agit en réalité de « Fachoda plus Bérézina ».

Fachoda en  effet car nos très bons alliés et fidèles amis séculaires Etats-Uniens se sont une fois de plus totalement désolidarisés de la France. Et, comme toujours en pareil cas avec nos fiables et indéfectibles partenaires anglo-saxons, ces derniers ont « joué perso ». Ils ont ainsi négocié dans le dos de Paris avec la junte nigérienne afin de pouvoir conserver leur base d’Agadès !!! Résultat, nous partons sous les crachats, mais  eux restent avec leurs dollars !!!

Bérézina également car l’arrogance, la suffisance, la naïveté et d’abord l’incompétence des danseurs à claquettes qui conseillent l’Elysée, ont placé le contingent français du Niger dans une telle situation que le désengagement va automatiquement prendre la forme d’une retraite. Or, le Niger étant un pays enclavé, deux options sont possibles qui s’apparentent effectivement à une nouvelle Bérézina… mais sans le corps des Pontonniers… :

1) Vers le Tchad. Cela impliquerait de longs et lourds convois progressant à travers tout le Niger sous les attaques de civils poussés sur nos convois afin d’obliger nos forces à ouvrir le feu avec toutes les conséquences médiatiques que l’on peut imaginer…A moins naturellement de verser à la junte une très forte rançon…Sans compter que le Tchad est un cul-de-sac où, de plus, se posent les mêmes  problèmes de fond qu’au Niger et au Mali…et alors, quand ce pays explosera, car il va finir par exploser, par où évacuer nos forces ? La lecture d’une carte est à ce sujet instructive…

2) Vers le Bénin et la mer. Fort heureusement, le Bénin a, avec le Niger une frontière de 266 kilomètres à une distance relativement courte de nos bases de la région de Niamey. Mais, encore, faudrait-il que Cotonou accepte le transit, ce qui sera probablement le cas moyennant une fois encore « espèces sonnantes et trébuchantes », ainsi qu’avantages divers…

Dans tous les cas, le prestige de la France n’existant plus, il va donc falloir penser à redéfinir une politique africaine, question qui constituera d’ailleurs le  dossier principal du numéro du mois d’octobre de l’Afrique Réelle que les abonnés recevront le 1er octobre.

Mais, d’ores et déjà, le réel impose que nos futures orientations stratégiques en Afrique passent par un dégagement du Sahel où il n’y a que des coups à prendre - et où la France n’a pas d’intérêts comme cela est démontré toujours dans le même numéro d’octobre de l’Afrique Réelle-, et par un retour à la tradition maritime du XVIIIe siècle, c’est-à-dire en faisant des littoraux nos bases d’action.
Et surtout, en laissant à ceux qui ne s’y sont pas encore « brûlé les ailes », la découverte des subtilités politiques, économiques, ethniques et démographiques des intérieurs d’un continent que Stanley qualifiait de « mystérieux »…

lundi 25 septembre 2023

Nouveau livre de Bernard Lugan : Eloge du duel





















Présentation

Une société qui sait se tenir ne craint pas de recourir aux armes pour régler ses différends, d’homme à homme. La nôtre l’a oublié, au bénéfice des couards, qui n’ont plus à payer le prix de leur impudence, sinon en frais de justice. Il y a fort à parier que certains journalistes ravaleraient leurs provocations et montreraient une salutaire prudence si leurs écrits les engageaient sur le pré… L’Éloge du duel, loin de célébrer la force brute, est tout au contraire une invitation à revenir à une civilisation réglée par le code de l’honneur, faite d’hommes trempés comme l’acier et de femmes qui se battent seins nus. Universitaire et mousquetaire dans l’âme, Bernard Lugan retrace l’histoire de cette noble institution et défend les valeurs viriles contre les velléités castratrices du wokisme.
- Editeur : La Nouvelle Librairie
- 168 pages
- Disponible dans toutes les librairies

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samedi 16 septembre 2023

Mali, retour à la case départ…

Le point de départ de l’actuelle guerre qui embrase le Mali, le Burkina Faso et le Niger n’est pas l’islamisme, mais la question de l’irrédentisme touareg. Le conflit a éclaté au mois de janvier 2012 dans le nord du Mali quand des combattants touareg mirent en déroute les forces armées maliennes. Les insurgés se réclamaient alors du MNLA (Mouvement national de libération de l’Azawad) qui avait été fondé au mois d’octobre 2011, deux ans donc après la fin de la quatrième guerre touareg. Le MNLA engerbait plusieurs mouvements touareg et son ossature était composée de membres de la tribu des Ifora qui avaient servi dans l’armée du colonel Kadhafi.

Avec le MNLA, en plus de la résurgence d’un conflit séculaire entre Touareg et sédentaires sudistes, c’était une nouvelle forme de revendication qui était formulée. Lors des quatre précédentes guerres, les Touareg s’étaient en effet battus pour obtenir plus de justice de la part de l’Etat malien dirigé par les sudistes. Au mois de janvier 2012, ils exigeaient tout autre chose, à savoir la partition du Mali et la création d’un Etat touareg, l’Azawad.

Or, pour des raisons classiques et plus qu’habituelles de rivalité entre sous-clans touareg, Iyad Ag Ghali, lui-même Ifora et chef des précédents soulèvements, avait été tenu à l’écart de la fondation du MNLA. N’acceptant pas cette éviction, il créa alors un mouvement rival dont les buts ethno-nationaux étaient les mêmes que ceux du MNLA. Mais, pour pouvoir exister, il le déclara islamiste. Début janvier 2013, Iyad Ag Ghali doubla le MNLA en lançant une offensive vers le sud, en direction de Mopti puis de Bamako. Le 8 janvier 2013 la ville de Konna fut prise et, le 11 janvier 2013, plusieurs colonnes se dirigeant vers le sud, furent « traitées » par des hélicoptères français. Le régime sudiste de Bamako fut alors sauvé d’une défaite annoncée, ce que les membres de la junte actuelle ont bien oublié…

Dès ce moment l’analyse française fut erronée. En effet, les « décideurs » français ne virent pas -ou refusèrent de voir- que l’islamisme n’était ici que l’habillage de la revendication touareg, qu’il n’était en quelque sorte que la surinfection d’une plaie ethno-raciale millénaire. Ceci fit que pour l’Elysée, Iyad Ag Ghali fut l’ennemi alors qu’en réalité il était la solution du problème et qu’il fallait prendre langue avec lui …Or, durant les années qui suivirent, la France refusa de comprendre cette réalité, le président Macron ordonnant même l’élimination de Iyad ag Ghali, ce que ce dernier  n’a pas oublié…

Or, avec le départ du Mali des forces françaises et de celles de l’ONU, le vrai problème, son cœur, est réapparu au grand jour, à savoir que ce n’est pas l’islamisme, mais l’irrédentisme touareg.  Entendons-nous bien, et je précise cela à l’attention de ceux qui  se font un plaisir de déformer mes propos, je ne parle ici que du seul nord Mali, non de la région des Trois frontières où la situation est différente car s’y superposent, ou s’emboitent, islamisme et problème peul.

En effet, et comme je n’ai cessé de l’écrire depuis des années, les abonnés à l’Afrique Réelle le savent bien, Iyad Ag Ghali qui est le chef historique des combattants touareg a constamment cherché à refaire l’unité des clans touareg autour de son leadership. Et il a réussi ! Les groupes armés touareg se sont en effet  regroupés dans le CSP-PSD (Cadre stratégique permanent- Pour la paix, la sécurité et le développement), qui inclut la CMA (Coordination des mouvements de l’Azawad), afin d’offrir un front commun face à l’armée malienne qui, avec l’appui jusque-là peu déterminant du groupe Wagner, tente de reprendre pied dans un Azawad dont elle avait été chassée en 2012.

Résultat, le 12 septembre dernier, à Bourem les forces armées maliennes ont subi une attaque meurtrière, là même où, au mois de janvier 2012, débuta la guerre qui est à l’origine de l’embrasement de toute la région. Quant à la ville de Tombouctou, elle est quasiment encerclée. Or, comme cette fois, les forces françaises ne viendront pas les sauver, les sudistes pourraient bientôt regretter d’avoir demandé le départ de Barkhane…

La longue histoire connait donc des résurgences naturellement ignorées par ceux qui prétendent définir la politique africaine de la France et qui portent la terrible responsabilité de l’humiliation que notre pays subit actuellement au Sahel et plus largement dans toute l’Afrique. Une longue histoire déroulée dans mon livre Histoire du Sahel des origines à nos jours.