Le 21 septembre 2008, le président Thabo Mbeki fut poussé à la démission par son propre parti, l’ANC, qui lui avait retiré sa confiance en raison d’ « interférences » dans le dossier d’accusation en corruption contre Jacob Zuma lequel briguait la Présidence. Le coeur du problème était la guerre ouverte que se livraient, à l’intérieur de l’ANC, les partisans et les adversaires de ce dernier avec, en toile de fond, la rivalité Xhosa-Zulu.
Le 22 septembre, un Sotho, M. Kgalema Motlanthe fut désigné comme Président dans l’attente des élections de 2009 avec pour tâche principale de tenter d’éviter l’éclatement de l’ANC, mais il échoua. Durant le mois d’octobre, les partisans de M. Mbeki décidèrent en effet de créer un nouveau parti dont le nom fut annoncé à la presse par M. Mbhazima Shilowa, ancien Premier de la Province du Gauteng. Il s’agissait du Congress of the People (COP) devenu COPE, qui fut enregistré le 10 novembre devant l’IEC (Independant Electoral Commission). Le lancement officiel de ce nouveau parti se fit le 16 décembre à Bloemfontein, fief de l’un de ses principaux leaders, M. Mosiuoa « Terror » Lekota, un Sotho, ministre de la Défense et ancien Premier de la Province du Free State.
Cette dissidence touchant le cœur de la vieille base ethnique xhosa de l’ANC, l’Afrique du Sud se trouvait donc à un tournant de son histoire car, depuis 1994 le mouvement exerce un « centralisme démocratique », appuyé sur une majorité absolue, tant au niveau national que local. Or, en contrôlant les législatures provinciales, l’Etat-parti peut donner une orientation jacobine à une Constitution pourtant fédérale. Avec un parti de gouvernement moins exclusivement dominant, donc avec un Etat central affaibli, le caractère fédéral de la Constitution allait peut-être pouvoir s’imposer. Là était le principal enjeu de ces élections législatives qui prirent la forme d’un plébiscite pro ou anti-Zuma.
Les résultats de ces élections doivent être étudiés avec attention car, par-delà son excellent score global apparent (65,90%), l’ANC recule de 4 points par rapport à 2004 (69,69%). Ce repli est sensible dans 7 provinces sur 9, l’ANC ne renforçant son score que dans les régions ethniques zulu (Kwazulu/Natal) ou dans le Mpumalanga, région à fort peuplement zulu où il maintient son pourcentage de 2004. Partout ailleurs le COPE a mordu sur son électorat. Au niveau national l’ANC subit un recul considérable dans certaines provinces : 4 points de moins dans le Limpopo ; près de cinq points dans le Gauteng ; 8 points dans le Northern Cape et dans le North West ;10 dans le Free State ;12 dans l’Eastern Cape ;15 dans le Western Cape. La seule exception est le Kwazulu/Natal où il progresse de 16 points, l’électorat zulu de l’Inkhata s’étant détourné de ce mouvement afin de voter pour le Zulu Jacob Zuma. Si nous retirons le Kwazulu/Natal et le Mpumalanga, nous constatons que l’ANC a perdu près de 9 points en moyenne au niveau national, ce qui lui donnerait un score de 57% et non plus de 65,90%. L’ANC a donc perdu une partie non négligeable de son électorat traditionnel, phénomène compensé par son excellent résultat dans le Kwazulu/Natal où il a gagné 1.227 339 voix par rapport à 2004.
Avec un score national de 7,42%, le COPE qui a comme nous l’avons dit, mordu sur l’électorat ANC, et sur lui seul, n’a pas réalisé la forte percée qu’il espérait en dépit de bons résultats dans le Northern Cape avec près de 16% des suffrages ou encore dans l’Eastern Cape avec un peu plus de 13% des voix. La principale explication de ce résultat moyen est qu’il n’a pas présenté de leader, mais un religieux inconnu du grand public qui a fait une campagne axée sur la lutte contre la corruption, prônant bonne gouvernance et moralité publique, alors que Jacob Zuma, diabolisé par la presse anglophone est apparu comme le leader populiste porteur de l’identité africaine. Cependant, si le vote Zuma est un vote interethnique noir, cette unité est fragile. Le vote nationaliste afrikaner a quasiment disparu, les Afrikaners ayant voté pour le DA. En dehors du Western Cape où les Métis ont très largement voté pour lui, ce sont les suffrages afrikaners qui assurent d’ailleurs au DA ses bons scores nationaux. L’Alliance démocratique (DA) d’Helen Zille, maire du Cap demeure l’opposition officielle au Parlement avec un score en progression de plus de 4 points (16,66%) par rapport à 2004 (12,33%) et dirigera la Province du Western Cape où l’ANC a subi un cuisant revers, passant de 46,27% des voix en 2004 à 31,55% en 2009.
Deux grandes tendances se dégagent de ce vote :
1) L’affaiblissement de l’ANC. Est-ce un accident de parcours ou une tendance lourde ? La question est essentielle car c’est la toute puissance de l’Etat-parti ANC qui est en jeu.
2) La division raciale du pays, les Blancs et les métis afrikanérophones ayant voté DA et les Noirs ANC ou COPE.
Bernard Lugan
07/05/2009
Le 22 septembre, un Sotho, M. Kgalema Motlanthe fut désigné comme Président dans l’attente des élections de 2009 avec pour tâche principale de tenter d’éviter l’éclatement de l’ANC, mais il échoua. Durant le mois d’octobre, les partisans de M. Mbeki décidèrent en effet de créer un nouveau parti dont le nom fut annoncé à la presse par M. Mbhazima Shilowa, ancien Premier de la Province du Gauteng. Il s’agissait du Congress of the People (COP) devenu COPE, qui fut enregistré le 10 novembre devant l’IEC (Independant Electoral Commission). Le lancement officiel de ce nouveau parti se fit le 16 décembre à Bloemfontein, fief de l’un de ses principaux leaders, M. Mosiuoa « Terror » Lekota, un Sotho, ministre de la Défense et ancien Premier de la Province du Free State.
Cette dissidence touchant le cœur de la vieille base ethnique xhosa de l’ANC, l’Afrique du Sud se trouvait donc à un tournant de son histoire car, depuis 1994 le mouvement exerce un « centralisme démocratique », appuyé sur une majorité absolue, tant au niveau national que local. Or, en contrôlant les législatures provinciales, l’Etat-parti peut donner une orientation jacobine à une Constitution pourtant fédérale. Avec un parti de gouvernement moins exclusivement dominant, donc avec un Etat central affaibli, le caractère fédéral de la Constitution allait peut-être pouvoir s’imposer. Là était le principal enjeu de ces élections législatives qui prirent la forme d’un plébiscite pro ou anti-Zuma.
Les résultats de ces élections doivent être étudiés avec attention car, par-delà son excellent score global apparent (65,90%), l’ANC recule de 4 points par rapport à 2004 (69,69%). Ce repli est sensible dans 7 provinces sur 9, l’ANC ne renforçant son score que dans les régions ethniques zulu (Kwazulu/Natal) ou dans le Mpumalanga, région à fort peuplement zulu où il maintient son pourcentage de 2004. Partout ailleurs le COPE a mordu sur son électorat. Au niveau national l’ANC subit un recul considérable dans certaines provinces : 4 points de moins dans le Limpopo ; près de cinq points dans le Gauteng ; 8 points dans le Northern Cape et dans le North West ;10 dans le Free State ;12 dans l’Eastern Cape ;15 dans le Western Cape. La seule exception est le Kwazulu/Natal où il progresse de 16 points, l’électorat zulu de l’Inkhata s’étant détourné de ce mouvement afin de voter pour le Zulu Jacob Zuma. Si nous retirons le Kwazulu/Natal et le Mpumalanga, nous constatons que l’ANC a perdu près de 9 points en moyenne au niveau national, ce qui lui donnerait un score de 57% et non plus de 65,90%. L’ANC a donc perdu une partie non négligeable de son électorat traditionnel, phénomène compensé par son excellent résultat dans le Kwazulu/Natal où il a gagné 1.227 339 voix par rapport à 2004.
Avec un score national de 7,42%, le COPE qui a comme nous l’avons dit, mordu sur l’électorat ANC, et sur lui seul, n’a pas réalisé la forte percée qu’il espérait en dépit de bons résultats dans le Northern Cape avec près de 16% des suffrages ou encore dans l’Eastern Cape avec un peu plus de 13% des voix. La principale explication de ce résultat moyen est qu’il n’a pas présenté de leader, mais un religieux inconnu du grand public qui a fait une campagne axée sur la lutte contre la corruption, prônant bonne gouvernance et moralité publique, alors que Jacob Zuma, diabolisé par la presse anglophone est apparu comme le leader populiste porteur de l’identité africaine. Cependant, si le vote Zuma est un vote interethnique noir, cette unité est fragile. Le vote nationaliste afrikaner a quasiment disparu, les Afrikaners ayant voté pour le DA. En dehors du Western Cape où les Métis ont très largement voté pour lui, ce sont les suffrages afrikaners qui assurent d’ailleurs au DA ses bons scores nationaux. L’Alliance démocratique (DA) d’Helen Zille, maire du Cap demeure l’opposition officielle au Parlement avec un score en progression de plus de 4 points (16,66%) par rapport à 2004 (12,33%) et dirigera la Province du Western Cape où l’ANC a subi un cuisant revers, passant de 46,27% des voix en 2004 à 31,55% en 2009.
Deux grandes tendances se dégagent de ce vote :
1) L’affaiblissement de l’ANC. Est-ce un accident de parcours ou une tendance lourde ? La question est essentielle car c’est la toute puissance de l’Etat-parti ANC qui est en jeu.
2) La division raciale du pays, les Blancs et les métis afrikanérophones ayant voté DA et les Noirs ANC ou COPE.
Bernard Lugan
07/05/2009