Le 27 novembre, et pour la première fois depuis le début de l’opération Serval, une manifestation
anti-française s’est déroulée au Mali, à Bamako, aux cris de « A bas la
France ».
Ces Maliens bien peu « reconnaissants » de ce qui a été fait
pour eux font à la France un reproche de fond : interdire à leur
armée de se repositionner à Kidal, au cœur du pays touareg. Or, durant la
campagne de l’Azawad, notamment lors des combats dans les Iforas, les forces
françaises furent renseignées par les Touareg du MNLA contre la promesse de ne
pas laisser l’armée malienne se repositionner à Kidal…
Culbutés par les Touareg, les militaires maliens qui se sont enfuis vers
Bamako fin 2011-début 2012, veulent aujourd’hui profiter du bouclier français
pour prendre leur revanche et réoccuper la totalité du territoire national, ce
que les Touareg refusent. Le 30 novembre dernier, le MNLA, rejoint par le MAA (Mouvement arabe de l’Azawad) et par le HCUA ( Haut conseil pour l’unité de
l’Azawad) a d’ailleurs déclaré qu’il reprenait la guerre contre l’armée
malienne.
Nos forces vont donc se trouver prises entre deux feux. Comme en Côte
d’Ivoire avec Laurent Gbagbo, ceux que nos éléments sauvèrent dans un premier
temps, risquent donc de devenir des ennemis qui nous reprocheront de ne pas les
laisser rétablir la souveraineté nationale sur l’ensemble du pays. Une aide salvatrice
se transformera donc en entreprise néo-coloniale… et la France devra une fois
de plus payer l’incohérence de sa politique !
Comme il fallait s’y attendre, et comme je n’ai cessé de le dire dans
tous mes communiqués consacrés au Mali (voir l’historique de ce blog et surtout
les numéros de l’Afrique réelle
traitant cette question), le problème de fond n’a pas été réglé par l’Opération Serval car il n’est pas
militaire. Il n’est pas davantage islamiste, le jihadisme n’étant que la
surinfection d’une plaie ethnique millénaire. La question est ethno-politique
car le sahel, monde
contact entre les civilisations sédentaires des greniers au Sud, et l’univers
du nomadisme au Nord, est un Rift racial le long duquel, et depuis la
nuit des temps, sudistes et nordistes sont en rivalité pour le contrôle des
zones intermédiaires situées entre le désert et les savanes.
Les élections ne résoudront donc évidemment pas cette réalité
géo-ethnographique. Elles ne feront que confirmer la mathématique ethnique
locale, l’ethno-mathématique selon ma formule qui me fut tellement reprochée
par les butors de la bien-pensance universaliste, mais qui est désormais
reprise par les plagiaires qui « pompent » littéralement mes analyses
sans jamais me citer[1].
Dans mon communiqué en date du 14 novembre 2012, j’écrivais ainsi que l’intervention
au Mali ne devait pas être construite comme une synthèse entre divers courants,
à l’image de ce qui se fait lors des congrès du parti socialiste. Il fallait certes
des objectifs militaires clairs -et l’armée française a parfaitement rempli sa
mission à cet égard-, mais avant tout une vision politique cohérente et
réaliste, à savoir la définition d’un nouvel équilibre entre le nord et le sud
du pays.
Après avoir bloqué les colonnes d’Ansar
Eddine qui fonçaient sur Bamako, il fallait donc conditionner nos
opérations de reconquête de Gao et de Tombouctou à l’acceptation par les
autorités maliennes de l’impératif d’un changement constitutionnel qui aurait
une fois pour toutes réglé le problème nord-sud.
Au lieu de cela, les cerveaux à nœud qui inspirent la politique
africaine de la France sont restés englués dans leurs dogmes
universalo-démocratiques, refusant de voir que les nordistes ne sont pas les
sudistes, que les élections n’ont jamais réglé en profondeur les problèmes
ethniques africains et qu’en définitive, nous n’avons fait que repousser le problème.
Mais qu’importe, puisque les militaires français sont sur place pour
solder leurs continuelles erreurs…
[1] Deux exceptions notables, JD Merchet dans son blog secret-defense et Frédéric Pons dans Valeurs Actuelles. Pour les autres, la ligne de conduite est : Lugan sert de banque de données, mais il ne faut pas le citer afin d’éviter de faire « pleuvoir grenades et gravats » sur sa petite carrière…
[1] Deux exceptions notables, JD Merchet dans son blog secret-defense et Frédéric Pons dans Valeurs Actuelles. Pour les autres, la ligne de conduite est : Lugan sert de banque de données, mais il ne faut pas le citer afin d’éviter de faire « pleuvoir grenades et gravats » sur sa petite carrière…
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