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vendredi 30 novembre 2018

L'Afrique Réelle n°108 - Décembre 2018

 

Sommaire

Numéro spécial : Indéveloppable Afrique ?

- Ni croissance, ni développement
- L’Afrique n’a pas progressé depuis les indépendances
- Le mensonge de la « Françafrique »
- La pauvreté n’a pas reculé
- La « classe moyenne » n’existe pas
- La preuve par le non investissement
- Algérie : un échec emblématique
- Le mythe du développement de l’Afrique confronté à la  réalité des chiffres


Editorial de Bernard Lugan :

Depuis les indépendances de la décennie 1960, les pays dits « riches » ont donné - et non prêté - plus de 2000 milliards de dollars à l’Afrique. En plus de ces dons, ils lui ont consenti de considérables effacements de dette. Plus de 97 milliards de dollars en 2009 pour une dette totale de 324,7 milliards de dollars (ONU, 2010). Le tout, pour un résultat proche de néant puisque le développement ne s’est produit nulle part. Comment aurait-il d’ailleurs pu se faire quand la suicidaire démographie neutralise par avance tout progrès ?

La crise que traverse actuellement l’Afrique montre que le discours afro-optimiste relève de la méthode Coué[1].  C'est pourquoi il est essentiel de revenir aux chiffres.

Pour les seules années 2010 à 2016, l’« aide au développement » (les dons) à destination de l’Afrique - remises de dette exclues -, s’est élevée à un peu plus de 55 milliards de dollars. En dollars constants et en seulement sept années, les pays dits « riches » ont donc fait comme cadeau à l’Afrique 2 fois et demi les 16,5 milliards de dollars du « Plan Marshall » européen. 

Or, comme nous le montrons dans ce numéro, moins de 30% de ces sommes abyssales ont été investies dans les infrastructures, le reste s’étant « perdu » dans les sables africains...

Par idéologie, et afin de ne pas décourager les généreux donateurs des pays « riches », les experts ont nié ces réalités. Ils ont proposé en revanche la tarte à la crème démocratique qui allait - du moins l'affirmaient-ils,- enfin permettre le démarrage du continent. 
Nouvel échec car, aujourd’hui, alors que la démocratie a partout été introduite au forceps et avec une singulière arrogance néo-coloniale, le développement n’est toujours pas au rendez-vous. 
Plus grave, comme la démocratie repose sur le « one man, one vote », les sociétés communautaires africaines ont été prises au piège de l’ethno-mathématique électorale qui donne automatiquement le pouvoir aux ethnies les plus nombreuses. Résultat, en plus du non développement, l’Afrique a connu la multiplication des guerres… 

Ces échecs successifs n’ont évidemment pas servi de leçon. Tétanisés par le basculement de leurs électorats dans un « populisme », provoqué par les flots migratoires qu’ils n’osent pas bloquer par de solides mesures de simple police, voilà en effet les dirigeants européens qui tentent de nous vendre l’idée d’une nouvelle augmentation de l’aide (lire les dons) à l’Afrique. Afin d’y provoquer son développement lequel tarira l’océan migratoire !!! 

Or, cette proposition est mensongère : 
- D'abord, parce que, comme nous venons de le voir, toutes les politiques de développement ont échoué.
- Ensuite, parce qu'en raison de la crise économique, les pays dits « riches » vont devoir se montrer moins généreux. Il va donc leur falloir faire un choix entre le mirage du développement de l'Afrique ou les défaites électorales annoncées.

En définitive, rien ne pourra être fait en Afrique, tant que la notion de « Difference » si bien mise en évidence par le maréchal Lyautey, ne sera pas prise en compte. C’est en effet parce que les Africains ne sont pas des Européens pauvres à la peau noire que la greffe occidentale n'avait, n’a et n’aura aucune chance de prendre sur le porte-greffe africain. Les vrais problèmes du continent sont en effet d'abord politiques, institutionnels, historiques, sociologiques, et géographiques, avant d’être économiques.

[1] Je fais cette analyse depuis trois décennies. La première fois dans mon livre Afrique, l’histoire à l’endroit publié en 1989. Ces analyses ont été actualisées dans mon livre Osons dire la vérité à l’Afrique.

4 commentaires:

  1. Quelle lucidité ! Quelle clairvoyance de l'analyse !
    Que faut-il de plus pour "éclairer" les pays donateurs !

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  2. En réponse au monsieur "unkown" du 7 décembre 2018:
    Votre question: "Que faut-il de plus pour éclairer les pays donateurs ????????"

    Ceci revouvre une triste réalité: il faut être de bon compte: jamais les pays "riches" ne vont arrêter ce mécanisme de donation aux pays africains... Pour plusieurs raisons: leurs opinions publiques ne "comprendraient pas" la suppression de cette aide. En effet, c'est devenu une habitude politique, économique, et sociale. On se justifie ainsi d'une "bonne conduite" morale, sociale, interétatique. Aucun reproche à recevoir donc. Que ce soit de son électorat ou à l'international. Mais il ne faut pas être naïf sur la valeur du mécanisme: les politiques de nos pays savent pertinemment (ou l'apprennent très vite) que les sommes sont détournées: les payements se font d'un compte étatique à un autre. Et puis ?? (Ils n'iront pas vérifier les flux financiers d'un autre état, n'est-ce pas?); Et bien, le pays bénéficiaire l'introduit dans son budget annuel et distribue selon les divers postes économiques du pays c'est à dire les nombreux comptes dont le bilan fait état (Recettes /Dépenses). Donc chez eux, il faut payer ceci et cela, et sûrement les fonctionnaires, qui gèrent et permettent une "stabilité" du fonctionnement étatique... Réfléchissez: ce sont même eux qui seront payés en premier... Et comme le président (ou son /ses équivalents) est un "fonctionnaire étatique" particulier, il aura droit à sa dotation annuelle plus les divers postes de compte pour le fonctionnement "correct" des services administratifs mis à sa disposition... (voitures, "gens de maison", sommes d'entretien des bâtiments, équipes de protection, ...) Je suppose que ça peut aller loin.

    Mais maintenant, que cette aide arrive pour des cas précis de circonstances sociales, (calamités climatiques, tremblement de terre, et j'en passe...) et bien on verra dans les faits si cela se concrétise sous forme d'aides dans le pays, n'est-ce pas? ... Et c'est ainsi que se dilapide le plus facilement du monde, au profit d'une minorité bien établie, l'aide financière étatique des pays européens. Ainsi pour les diverses urgences (Dons supplémentaires ?) la répartition se fait toujours du bloc commun des recettes, (un seul "compte global". Peu importe d'où elles viennent) vers les divers postes de l'état bénéficiaire. Et dans les registres, on peut toujours "justifier" de divers postes d'affectation de ces sommes. Même si dans le détail, on comprend facilement que certaines affectations sont "bidon". Et donc le mécanisme bien rodé se perpétue...

    Donc paradoxalement, les petites associations en tous genres dans les pays européens font plus en termes d'efficacité pour toucher /aider les gens de ces pays que les grosses sommes déboursées par les états européens. Ces sincères donateurs libèrent (moyens parfois dérisoires mais sincères et pratiques) du terrible fardeau de la privation du manque de moyens. Ce manque est dû à la pauvreté des gens démunis de ces pays "en voie de développement"

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  3. En vous lisant je l’impression d’obser un verre à moitié plein .Monsieur Lugan dans son énoncé à bien précisé que moins de 30% de cette aide est réellement perçue alors que se passe -t-il avec le 70%restante? Supposons que l’arrosé l’africa perçoit 50% où vas le
    20%restante ? Le donateur n’est pas un représentant de la fondation Abbé Pierre ce qui me laisse à penser que le système arrange bien ceux qui reçoivent et ceux qui donnent sur le dos du peuple Africain.Pour moi il faut simplement arrêter ce cercle vicieux qui nuit aux initiatives du peuple Africain.

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  4. Quelle lucidité dans votre explication ! Super travail.

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