En Côte d’Ivoire, à l’effondrement du prix de la noix de cacao, vient de s’ajouter une nouvelle
mutinerie militaire, la seconde depuis le début de l’année. Le plus grave pour
le régime est que ce mouvement émane de ceux qui portèrent le président
Ouattara au pouvoir.
Retour en arrière :
début janvier 2017, une première mutinerie affecta le noyau dur des fidèles du
président, ceux qui avaient combattu pour le hisser au pouvoir et qui, en
récompense, avaient été intégrés à l’armée nationale. Ne se satisfaisant pas de
ces « embauches », les mutins exigeaient non seulement le versement de
primes, mais encore l’équivalent de 7500 euros… plus une maison. Des
prétentions insensées dans un pays où la moitié de la population survit avec un
euro par jour. Et pourtant, paniqué et impuissant, le gouvernement céda
immédiatement à ces demandes exorbitantes. Or, loin d’apaiser la situation,
cette capitulation provoqua une réaction en chaîne de la part de tous les
« corps habillés », à savoir les policiers, les gendarmes, les douaniers
et les pompiers.
Respectant sa
promesse, le gouvernement versa 5 millions de francs CFA, soit 7620 euros à chacun
des 8400 hommes concernés, le reste devant l’être en plusieurs termes. Or, les
responsables de la mutinerie du mois de janvier négocièrent avec le
gouvernement dans le dos de leurs mandants et, à l’issue d’un marchandage
complexe, ils renoncèrent officiellement au versement du reste des sommes
promises, à savoir environ 7 millions de francs CFA par mutin. La
« base » n’ayant pas accepté ce geste « patriotique », elle
a accusé ses leaders d’avoir été achetés…Voilà pourquoi, le 12 mai, une nouvelle
mutinerie a éclaté à Bouaké, puis à Abidjan. Une mutinerie d’hommes de base
livrés à leur bon vouloir et n’ayant plus de cadres pour les contrôler…
Pour encore compliquer
l’affaire, ceux des « anciens combattants » ayant porté Alasssane
Ouattara au pouvoir et qui n’ont pas été intégrés dans l’armée, réclament eux
aussi ce qu’ils estiment être leur dû. Or, en raison de l’effondrement du prix
de la noix de cacao, les caisses de l’Etat sont vides.
Le président Ouattara
se trouve donc face à un choix douloureux :
1) Soit céder une
nouvelle fois en confirmant ainsi que son pouvoir est d’une extrême faiblesse,
avec pour conséquence que sa survie politique pourrait ne pas durer jusqu’à la
fin de son mandat prévu en 2020.
2) Soit faire preuve
d’autorité et tenter de mettre au pas des mutins avec pour résultat d’entrer en
confrontation directe avec le cœur de ses partisans. Pour le plus grand profit
de ses opposants…
Dans le numéro du mois
de juin 2013 de l’Afrique Réelle, j’écrivais :
« Hissé au pouvoir par le président Sarkozy,
Alassane Ouattara n’a toujours pas réussi à se dégager de l’image de fondé de
pouvoir du nouvel ordre économique mondial qui lui colle à la peau. Arrivé à la
présidence dans les fourgons des forces spéciales de l’ancien colonisateur, son
prestige est limité ; c’est pourquoi il n’a pas réussi à prendre ses
marques, prisonnier qu’il est d’une histoire politique dont il ne parvient pas
à s’extraire ».
A moins d’une rapide
et spectaculaire reprise en main, l’avenir de la Côte d’Ivoire s’annonce donc
difficile. Or, avec le Nigeria et l’Afrique du Sud, la Côte d’Ivoire est l’une
des trois « locomotives » de l’Afrique sud-saharienne… Mais le Nigeria
est en récession et en proie à de très graves problèmes régionaux dont, mais
pas exclusivement, celui de Boko Haram ; l’Afrique du Sud a une croissance de 0,1% et traverse une très
grave crise politique, économique et morale. Quant à la Côte d’Ivoire…Au-delà de leur portée régionale, les
évènements de Bouaké et d’Abidjan
illustrent la faillite d’un continent auquel « experts » et
« spécialistes » mentent depuis l’époque des indépendances. Un
« pieux » mensonge fondé sur l’approche économique, l’illusion
universaliste et la juteuse escroquerie qui a pour nom
développement [1].
[1] Voir à
ce sujet mon livre « Osons dire la vérité à l’Afrique ». Pour le
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et bien ce pays n' est pas sorti d' affaire !
RépondreSupprimerCela me fait exactement penser aux différentes spéculations sur les ressources vivrières, dans lesquelles sont impliquées les plus grandes banques américaines et européennes(voir scandale du LIBOR et des matières premières, voir le site de PIERRE JOVANOVIC) et avec les conséquences pathétiques et pitoyables des différentes révolutions de couleurs et de fleurs survenues depuis près de 30 ans dans différents pays.
RépondreSupprimerLa Côte d'Ivoire est une "Algérie-Bis".
RépondreSupprimerLes Ivoiriens sont des "Blackgériens". ( Ils en méritent le sobriquet).
Et le cacao est à la Côte d'Ivoire ce que le pétrole est à l'Algérie.
Je me faisais cette réflexion aussi
SupprimerBeaucoup de similitudes entre ces 2 pays