Un communiqué du SACP (South
African Communist Party) en date du 6 décembre 2013 nous apprend officiellement
ce dont l’on se doutait, mais qui n’avait jamais été réellement établi, à
savoir que le « camarade Nelson
Mandela » était un haut dirigeant communiste puisqu’il « (…) ne faisait pas seulement partie du SACP,
mais également de son Comité central ».
Pourquoi a-t-il toujours démenti, tant oralement que par écrit, avoir
été membre du SACP ? Pourquoi donc a-t-il menti ?
Un retour en arrière s’impose. En 1960, quand Nelson Mandela fut nommé-coopté
au Comité central du SACP, le monde était en pleine « guerre
froide » et les soviétiques avaient décidé de menacer la route du Cap,
vitale pour ce qui était alors l’ « Occident », en déstabilisant
le pays qui en était le gardien, à savoir l’Afrique du Sud. Pour l’URSS, la lutte
contre l’apartheid fut le moyen de populariser cette stratégie en lui donnant
un « habillage » moral. La mission que le KGB confia alors à Nelson
Mandela, fut de prendre le contrôle de l’ANC au profit du SACP en évinçant la
vieille garde réformiste et non-violente qui le contrôlait, afin de lui faire
adopter la lutte armée.
Aidé par Yossef Mashel Slovo, dit Joe Slovo, un officier supérieur
du KGB, Nelson Mandela s’acquitta parfaitement de ces deux missions. Il réussit
ainsi à imposer la création de l’Umkhonto
we Sizwe, l’aile militaire et terroriste de l’ANC dont il fut le premier
chef. Il transforma également l’ANC en une simple courroie de transmission du
SACP. En 1989, sur les 30 membres de son comité directeur, quatre ou cinq revendiquaient
ainsi officiellement leur appartenance au SACP cependant que plus d’une
vingtaine étaient des membres clandestins du parti ayant reçu l’ordre de cacher
leur appartenance afin de ne pas effaroucher les « compagnons de
route » et les « idiots utiles ».
Le SACP a donc brisé un secret jusque là bien gardé et cela, au risque
d’écorner le mythe Mandela. Pourquoi?
La réponse est d’une grande simplicité : le SACP est politiquement
en perdition car il est perçu par les Noirs comme un parti archaïque « blanc »
et « indien ». Or, depuis 1994, la vie politique sud-africaine repose
sur un partage du pouvoir, donc des postes et des prébendes, entre l’ANC, le
syndicat Cosatu et le SACP. Il s’agit de l’Alliance tripartite. Cette rente de
situation est aujourd’hui fortement contestée par de nouvelles forces
politiques noires demandant que les « dépouilles opimes » étatiques soient
repartagées à la lumière de la véritable représentativité des uns et des
autres. Afin de tenter de conserver sa place au sein de l’Alliance tripartite, le
SACP à bout de souffle a donc révélé que le « grand homme » était un
de ses dirigeants…
Ce misérable calcul boutiquier aura du moins un grand avantage car il
permettra peut-être d’ouvrir les yeux à ceux qui pleurent un Nelson Mandela pacificateur-rédempteur
alors qu’il était en réalité un agent du KGB, une « taupe communiste »
dans le vocabulaire de la « guerre froide »…
Je souhaite donc un bon réveil après
l’hypnose à ceux qui ont cru voir en lui le messie d’une nouvelle religion
universelle[1].
Bernard Lugan
21/12/13
[1] Cette question sera développée dans le numéro de janvier 2014 de l’Afrique Réelle que les abonnés à jour d’abonnement recevront vers le 5 janvier.
Bonjour,
RépondreSupprimerCette information est intéressante, davantage sur la stratégie de l'URSS en Afrique du Sud lors de la guerre froide, et son importance dans le combat des forces sud-africaines anti-apartheid, que sur le parcours de Mandela lui-même.
Je me permets juste d'apporter ce commentaire: Je pense pour ma part qu'il faut faire attention au terme "terroriste" lorsqu'on parle de Mandela, car c'est un terme un peu dangereux, utilisé à tort et à travers, qu'on attribue aujourd'hui aux actes criminels et meurtriers dans une stratégie de terrorisation de civils. Mandela n'est passé à la lutte armée qu'en 1960-61 (après Sharpeville), alors qu'il avait rejoint l'ANC en 1944-45. Il a donc 15 ans de lutte nonviolente et 2 ans de lutte violente. De plus, ses actions violentes en 1961-1962 (jusqu'à son arrestation) ne sont pas des massacres de civils ou attentats suicides du style al-Qaïda, mais des sabotages d'infrastructures, dans lesquels les civils ne sont pas visés. Je pense qu'il convient d'être précis et rigoureux en analysant l'histoire, et le terme "terroriste" peut prêter à confusion et donner une image erronée de Nelson Mandela.
Bien cordialement,
John Xavier PAUL
Washington, D.C.
Une réponse adroite et plus juste qu'un dévéloppement de pensée livresque que je trouve si souvent dans les écrits de notre Cher Bernard. J'ai trouvé chez nombreux de nos professeurs, ce sens de développer des théories qui de fois sont éloignées de la vérité réelle vérifiable sur terrain. Malheureusement, leurs théories étant prises pour des vérités et non des avis discutables des chercheurs, induisent en erreur les opinions de ceux qui n'ont pas l'occasion ni les moyens d'acceder facilement à l'information.
Supprimer"Je souhaite donc un bon réveil après l’hypnose à ceux qui ont cru voir en lui le messie d’une nouvelle religion universelle"
RépondreSupprimerPersonne ne voit de messie ni de religion, mais juste l'humanisme d'un Homme qui a eu un role important pour eviter la guerre civile a une periode ou la peur et la rancoeur regnaient en Afrique du Sud.
Informez donc objectivement, s'il vous plait, sur le role et les actions de Mandela tout au long de sa lutte, dans son ensemble, pour la condition des noirs Sud-Africains, et sa contribution pour la reconciliation nationale, plutot que d'emettre des jugements de valeur sur les millions de personnes qui le pleurent a travers le monde.
Merci d'avance pour votre rigueur, si vous n'etes vous meme pas hypnotise par d'autres elements.
Cordialement
Paul Cavalier.