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mercredi 18 février 2015

Libye : qui présentera "l'addition" à MM. Sarkozy, Juppé et BHL ?

Au mois de mars 2011, à l'issue d'une campagne médiatique d'une rare intensité initiée par BHL, Nicolas Sarkozy décida d'entrer en guerre contre le colonel Kadhafi avec lequel il était encore dans les meilleurs termes quelques mois auparavant.
Le 17 mars, Alain Juppé, ministre des Affaires étrangères, arracha la résolution 1973[1] au Conseil de Sécurité de l'ONU, ce qui permit d'ouvrir les hostilités.
Le 19 mars, 19 avions français (chasseurs et ravitailleurs) lancèrent un raid de 2h30 au dessus de la Libye. L'incompréhensible guerre franco-libyenne ou otano-libyenne, venait de débuter.

Les raisons de ce conflit aux conséquences à ce point dramatiques qu'une intervention internationale paraît aujourd'hui indispensable sont toujours aussi mystérieuses. A l'époque, l'Elysée avança l'argument d'une action humanitaire destinée à "sauver la population de Benghazi". Le mardi 16 décembre 2014, le président tchadien Idriss Deby donna une autre explication en déclarant qu'en entrant en guerre en Libye: " l'objectif de l'OTAN était d'assassiner Kadhafi. Cet objectif a été atteint "[2].

Quoiqu'il en soit de ses causes officielles ou officieuses, réelles ou supposées, étayées ou fantasmées, le résultat de cette guerre "pour la démocratie et les droits de l'homme", est catastrophique :

- Les alliés islamistes du Qatar et de la Turquie ont pris le contrôle d'une partie des approvisionnements gaziers et pétroliers de l'Europe.
- Daesh a lancé une entreprise de coagulation des milices islamistes. Celles qui lui ont fait allégeance contrôlent une partie de la Cyrénaïque et à l'ouest, elles sont sur la frontière tunisienne. Partout, elles font régner la terreur.
- L'Egypte est directement menacée ainsi que la Tunisie et l'Algérie. Au sud, le Tchad et le Niger sont en première ligne alors qu'avec Boko Haram un second front islamiste s'est ouvert sur leurs frontières.
- Les gangs islamo-mafieux déversent des dizaines de milliers de migrants sur les côtes européennes. Au lieu de les refouler, la marine italienne les récupère en mer pour les installer en Europe... d'où ils ne repartiront plus. Or, tout le monde sait que des terroristes se dissimulent parmi eux et qu'ils vont créer des cellules "dormantes" au sein de l' "espace Schengen".

Face à ce désastre, comme s'ils étaient étrangers au chaos qu'ils provoquèrent, Nicolas Sarkozy et Alain Juppé aspirent à la plus haute charge de l'Etat français. Quant à leur inspirateur guerrier, il continue à promener sa superbe et son échancrure de col sur les plateaux des télévisions...

Bernard Lugan
18/02/2015

[1] Voir à ce sujet le texte de la conférence de presse d'Alain Juppé à New York (www.ambafrance-at.org).
[2] Voir mon communiqué daté du 1 janvier 2015 dont le titre est "Le but de la guerre était-il d'assassiner le colonel Kadhafi ?".

dimanche 15 février 2015

Nigeria-Tchad : la nouvelle stratégie de Boko Haram

Boko Haram qui contrôle une partie du Nigeria opère désormais au Niger, au Cameroun et également au Tchad. Dans un premier temps sa stratégie fut d'exacerber la fracture entre le nord et le sud du Nigeria afin d’imposer l’indépendance d'un Etat théocratique nordiste inscrit dans la tradition des émirats du XIXe siècle. Une rupture s'étant ensuite produite entre les Haoussa et les Kanouri, ces derniers formant la base ethnique du mouvement, la stratégie de Boko Haram a  changé. Désormais, son objectif est le pourrissement de la région péri tchadique à travers la zone de peuplement kanouri qui déborde largement du Nigeria puisqu'elle s'étend au Niger, au Cameroun et au Tchad. Une évolution qui n'a pas été vue par les observateurs et qui change d'autant plus en profondeur les données du problème que Boko Haram commence à recruter parmi les populations arabes péri tchadiennes.

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lundi 2 février 2015

L'Afrique Réelle N°62 - Février 2015


























Sommaire

Actualité
- Algérie : L'effondrement du prix du pétrole menace la paix sociale
- Le Nigeria et le Niger face à Boko Haram
- Burkina Faso : De Thomas Sankara à Blaise Compaoré

Histoire
Le premier conflit mondial en Afrique du Nord

Afrique du Sud
Quand Mgr Lafont louvoie entre niaiserie, aveuglement et déni de réalité


Editorial de Bernard Lugan :

Par leurs provocations irresponsables, les « Charlie » réussiront-ils à paralyser la lutte anti-jihadiste au Sahel ?

1) Parlons vrai : que cela plaise ou non, pour une grande partie de l'Afrique, l'odieux assassinat des journalistes de Charlie Hebdo est vu comme la « juste punition de blasphémateurs ». Quant aux imprudents responsables africains qui furent littéralement convoqués à la marche parisienne des « Charlie », notamment les présidents Ibrahim Boubacar Keita du Mali et Mahamadou Issoufou du Niger, les voilà désignés comme des ennemis de l'islam. Ils sont donc politiquement affaiblis et cela alors qu'ils sont en première ligne contre le jihadisme.

Les conséquences géopolitiques qui vont découler de cette situation ne peuvent encore être mesurées. Notamment au Niger où Boko Haram qui, jusqu'à présent ne s'était pas manifesté, a pris le prétexte de la livraison du numéro spécial de Charlie Hebdo publié après les assassinats, pour lancer des foules fanatisées contre les intérêts français à Zinder et à Niamey. Au même moment, nos postes militaires avancés veillent aux frontières du pays pour empêcher le Niger de passer sous le contrôle des jihadistes...

Un officier supérieur égyptien pourtant peu suspect de sympathies islamistes me disait récemment : « Quand Charlie Hebdo représentait le pape Benoît XVI sodomisant un enfant de choeur, ses journalistes passaient pour de facétieux potaches et les catholiques protestaient par la prière. Mais quand ils insultent le prophète Mahomet, ils le paient de leur vie. Il est désolant de devoir constater que ce sont les malades mentaux salafistes qui, par l'assassinat, rappellent vos journalistes à la décence ».

Cruelle réflexion !
Les irresponsables de Charlie Hebdo ont-ils conscience des dégâts que leur jusqu'au-boutisme a provoqué en Afrique ? Peuvent-ils comprendre qu'ils ont mis en danger la vie de Français expatriés ? Peuvent-ils imaginer qu'ils fournissent des armes aux jihadistes tout en paralysant nos soldats engagés dans de difficiles combats pour les réduire ?

2) Mortelle culture de l'excuse : des terroristes islamistes de nationalité française et issus de l'immigration assassinent 17 compatriotes. Pour le Premier ministre français, l'origine de ces crimes odieux est à rechercher dans l' « apartheid » qu'auraient pu subir les meurtriers...
Au lieu de s'attaquer aux vraies causes du mal, voilà donc ouvert un nouveau et inutile débat sémantique à travers l'utilisation d'un « mot-prison » permettant à des politiciens faillis de gagner du temps et des points de popularité[1]. Tout en tentant de faire oublier que les tragiques évènements du mois de janvier 2015 sont une conséquence du « grand remplacement » dont ils sont responsables...

[1] Pour ce qui est du véritable sens du mot « apartheid », on se reportera au chapitre XIII de mon livre Mythes et manipulations de l'histoire africaine intitulé « Apartheid mérite-t-il d'être devenu un "mot prison" ? »