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jeudi 2 mai 2013

Le 10 mai, avec la « Journée des mémoires de la traite négrière, de l’esclavage et de leurs abolitions », c’est encore un anniversaire de culpabilisation à sens unique qui est célébré

Sous la présidence de Jacques Chirac les députés votèrent à l’unanimité, (donc tous les élus de « droite »), et en première lecture, la loi dite « Taubira ».  Définitivement adoptée le 10 mai 2001, cette loi qualifie de « crime contre l’humanité » la seule traite esclavagiste européenne. Christiane Taubira a insolitement précisé que sa loi passe sous silence la traite arabo-musulmane[1] afin que les « jeunes Arabes (…) ne portent pas sur leur dos tout le poids de l’héritage des méfaits des Arabes » (L’Express du 4 mai 2006).

Et pourtant, au XIXe siècle, l’abolition décidée par les Européens ne concerna pas les Arabo-musulmans. Depuis la Libye, au nord, ou depuis Zanzibar, à l’est, des caravanes organisées militairement continuèrent en effet à dévaster des régions entières de l’Afrique noire. Au XIXe siècle, au centre comme à l’Est du continent, les réseaux esclavagistes musulmans étaient en pleine extension ; la documentation abonde les concernant.
Dans la région sahélienne, de la boucle du Niger au Tchad, les esclavagistes puisaient dans le « vivier humain » du bilad al Sudan, Bambara, Sénoufo et Sara étant leurs principales victimes.
Dans la région du Haut Nil, l’actuel Sud Soudan, Dinka, Nuer et Chillouk étaient pourchassés, les femmes pour leur beauté et les jeunes garçons pour être « transformés » en eunuques gardiens des harem.  
Dans l’Est de l’Afrique, les esclavagistes zanzibarites ravageaient les actuels Etats de Tanzanie, d’Ouganda, de RDC, de Zambie ainsi que tout le Nord du Mozambique. Tirant l’essentiel de ses revenus de la vente des esclaves, le sultan de Zanzibar avait constitué un corps de fonctionnaires  chargé de tenir un compte  précis du nombre de captifs débarqués sur son île. Grâce aux registres des perceptions douanières, nous savons ainsi qu’entre 1830 et 1873, environ 700 000 esclaves furent vendus sur le seul marché de Zanzibar. Ces chiffres ne valent cependant que pour le commerce officiel du sultanat et ils ne tiennent pas compte de la contrebande.

Ce fut l’administration coloniale qui mit un terme à ces odieuses pratiques. Certaines ethnies ne survécurent alors que parce que la colonisation sépara victimes et razzieurs, comme au Mali, comme au Niger, comme au Tchad, comme en Centrafrique, comme au Nigeria, comme en RDC, comme en Tanzanie, comme en Ouganda, comme au Soudan, comme au Malawi, comme au Mozambique etc... Ce furent les Européens qui firent fermer le marché de Zanzibar en 1873. Ce furent également eux qui, à partir de 1890, obligèrent les autorités égyptiennes à interdire aux 78 marchands d’esclaves du Caire et aux 73 d’Alexandrie de cesser cette activité[2].
 
En 2005, Jacques Chirac décida que le 10 mai, jour de l’adoption de la loi Taubira, serait désormais célébrée la « Journée des mémoires de la traite négrière, de l’esclavage et de leurs abolitions ». Rompant avec une sage pratique voulant, sauf exception, que des dates du passé soient toujours choisies pour célébrer les évènements historiques, le président de la République faisait ainsi d’une date du présent un jour de commémoration d’évènements du passé…
Et pourtant, le 27 avril, date anniversaire  de l’abolition de l’esclavage en France (27 avril 1848) était la date idéale qui aurait permis de célébrer cette « Journée des mémoires de la traite négrière, de l’esclavage et de leurs abolitions » dans un climat d’unanimisme national. Jacques Chirac a préféré une date clivante.

Tout cela n’est cependant qu’un début car les  groupes de pression constituant le noyau électoral de François Hollande, modernes Minotaures à l’insatiable appétit, réclament maintenant des « réparations » sonnantes et trébuchantes. Comme les caisses de l’Etat sont vides, notre « pauvre » président ne va donc pouvoir nourrir ses électeurs que de paroles. Il faudra donc qu’elles soient roboratives. C’est pourquoi nous pouvons nous attendre à de nouvelles rafales de déclarations et de mesures symboliques de repentance.

Voilà comment le totalitarisme se met en place et comment, lentement mais sûrement, nos « élites » gouvernantes, totalement coupées du « pays réel » se préparent des lendemains difficiles. Notamment parce que Madame Taubira dont les condamnations sont sélectives, ignore probablement, et les Romains l’avaient appris à leurs dépens, que  chez les Gaulois « la patience dont on abuse se change en fureur ».

Bernard Lugan
02/05/13


[1] L’Afrique Réelle du mois de mai 2013 consacre un important dossier aux traites arabo-musulmanes.
[2] Voir mon livre Mythes et manipulations de l’histoire africaine. Mensonges et repentance. A commander sur ce blog.

10 commentaires:

  1. Pourquoi n'y a t-il aucune trace de population noire dans les pays arabo-musulmans, malgré une déportation si massive de population? Est-ce parce que les arabes "n'importaient" que des mâles? Cela n'aurait-il pas du avoir des répercussions dans les pays d'origine?

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    1. J'apprécie beaucoup les travaux du Pr Lugan et ayant passé plusieurs années en afrique, j'ai pu en vérifier bon nombre d'assertions. Mais j'aimerai bien avoir une réponse à ma question: pourquoi n'y at-il pas trace de population noire dans les pays arabo musulmans (comme aux amériques) après une telle déportation de population via zanzibar?

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    2. Vous trouverez une réponse dans le livre de Tidiane N'diaye,
      " Le génocide voilé". Au chapitre VIII, page 187 : Extinction ethnique programmée par castration massive.
      En ce qui concerne les femmes on lit page 200 : "Les femmes noires étaient systématiquement avortées ou leurs enfants réduits en servitude et quant aux garçons le plus souvent eunuques. Quelquefois les enfants nés accidentellement étaient tués par les concubines arabes. C'était une pratique courante que tout le monde trouvait <>.

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  2. Malheureusement Mr Lugan j'ai l'impression que vous prêcherez encore une fois dans le vide.
    Encore bravo ... en espérant trouver de l'écho ailleurs.

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  3. Vous me faites honte avec votre amour pour l'afrique ...
    Si vous aimez tant ce continent partez vous y installer et laisser notre belle France tranquille.
    Y en a marre de toute votre propagande.

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  4. "... obligèrent les autorités égyptiennes à interdire aux 78 marchands d’esclaves du Caire et aux 73 d’Alexandrie de cesser cette activité ..."

    Si on oblige à interdire de cesser une activité, l'activité continue?

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  5. Chez les Gaulois « la patience dont on abuse se change en fureur ».
    A ce moment là, ils n'ont même plus peur du ciel !!!
    Tous nos soit disant élites devraient relire ce que le passé enseigne.

    Macmau13

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  6. La region du Souss marocain et des oasis du tafilalete est plein de gens race noir dont les origines sont les esclaves de guinnée et autre.
    La garde des sultans Marocains était composé de noir , ceci explique l'existance de noir au maroc descendant de ces dernier.
    Las Abid El boukhari , une ville comme mehdia au nord de rabat a une population noir , en effet , ils sont les descendants de la garde noir qui stationnait la Bas.A mekness Aussi , ancienne capitale du maroc ISmaeilien

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  7. Il est assez normal que ce soit juste les coupables qui culpabilisent. Pourquoi les victimes de ces atrocités auraient-elles un sentiment de culpabilité? Heureusement que tout ça est révolu.

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    1. A Julie,
      Il est normal de se souvenir et de condamner des événements horribles comme la traite négrière. Par contre, vous évoquez des "victimes" de l'esclavage aujourd'hui.....De qui parlez vous? Des citoyens français des DROM des Antilles? Je vous rappelle qu'ils ont tous les droits ( et devoirs) possibles dans notre république.
      Ils ne sont en rien victimes de l'esclavage....
      Si l'on pousse votre raisonnement, les habitants du Palatinat devraient demander des réparations pour les massacres commis par les armées de Turenne au 17ème...
      Et Pourquoi ne pas demander des réparations aux italiens pour cette invasion injustifiée de la Gaule vers 59 avant JC?? 2 millions de victimes en 10 ans? ça ne compte pas???
      Les victimes de l'esclavage ont souffert et méritent ce souvenir, leurs descendants ne souffrent plus de l'esclavage....Le statut de victime n'est pas transmissible ad eternam.

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