lundi 25 juin 2012

Selon le général Nyamwasa, Paul Kagamé aurait ordonné l’assassinat du président Habyarimana

Jeudi 21 juin, à Johannesburg, le général Faustin Kayumba Nyamwasa, ex chef d’état-major de l’armée rwandaise a fait une déclaration proprement fracassante en affirmant sous serment que Paul Kagamé « a ordonné le meurtre du président Habyarimana». Réfugié en Afrique du Sud depuis 2010, il confirmait ainsi les termes de l’ordonnance du juge Bruguière accusant l’actuel chef de l’Etat rwandais d’être à l’origine de l’attentat déclencheur du génocide du Rwanda.

Ancien chef d’état-major de l’armée rwandaise, ce Tutsi de haute lignée, co-fondateur du FPR, demande depuis des mois à être entendu par la justice française car il détient tous les secrets entourant la période 1990-1994. Il figure d’ailleurs parmi les neufs très hauts responsables contre lesquels le juge Bruguière a émis des mandats d’arrêt internationaux pour leur « participation » réelle ou supposée à l’assassinat du président Habyarimana.
Après avoir rompu avec Paul Kagamé, le général Nyamwaza se réfugia en Afrique du Sud où il fut victime d’une tentative de meurtre et très grièvement blessé. C’est à l’occasion du procès des six hommes qui tentèrent de le réduire au silence qu’il a fait les déclarations explosives qui, en toute logique, devraient permettre de donner une nouvelle impulsion aux investigations des juges anti-terroristes français chargés d’enquêter sur l’assassinat du président Habyarimana et dans lequel périrent trois ressortissants français.
Ces déclarations venant après celles de Théogène Rudasingwa, ancien chef de cabinet de Paul Kagamé et après celles de son ancien chef du service de renseignements, lui aussi réfugié en Afrique du Sud où il vit sous protection policière, l’heure de vérité sur l’attentat du 6 avril 1994 approche donc inexorablement. En dépit des manœuvres d’enfumage périodiquement tentées par l’actuel régime rwandais.

Bernard Lugan
25/06/12

mardi 12 juin 2012

L'Afrique Réelle N°30 - Juin 2012


























Numéro spécial : l'Algérie cinquante ans plus tard

Sommaire :

Actualité :
- L'Algérie, ce pays riche qui a du mal à exister
- Comment les islamistes ont pris le contrôle de la société algérienne
- L'islamisme : un corps étranger désormais intégré

L'histoire officielle et ses mythes
- Une histoire artificiellement reconstruite
- La fracture arabo-berbère dans le nationalisme algérien

La guerre d'Algérie
- Guerre d'Algérie ou guerre d'indépendance algérienne ?
- Les grandes phases de la guerre
- Le vrai bilan de la guerre
- Eté 1962 : cette terrible épuration ethnique que l'on veut cacher

Controverses
- Jacques Soustelle et l'utopie de l'intégration
- Le cardinal Lavigerie et la colonisation de l'Algérie
- De Gaulle a toujours voulu l'indépendance de l'Algérie
- La France s'est ruinée en Algérie

Editorial : Lyautey contre Lavigerie et Crémieux

L’échec de l’Algérie française date du lendemain de la guerre de 1870 quand le régime civil remplaça le régime militaire. La colonisation de l’Algérie se fit alors au nom de l’universalisme républicain qui prétendait transformer les musulmans en Français grâce à l’ « école de la République ».
Dans ce numéro spécial de l’Afrique Réelle, est reproduit un document peu connu. Daté du 1er décembre 1870, au lendemain donc de la défaite française face à la Prusse, ce texte fut écrit de la main de Mgr Lavigerie à l’intention d’Adolphe Isaac Crémieux, alors en charge des affaires algériennes. Le prélat y livre ses intentions résolument jacobines au sujet de l’Algérie, faisant ainsi cause commune avec le farouche républicain qu’était Crémieux. Les deux hommes se trouvèrent alliés pour détruire les Bureaux arabes, cette élite de l’armée française qui avait réussi la pacification de l’Algérie avec peu de moyens, pratiquant la politique du prestige, du respect et de la différence, à l’image de ce que feront plus tard les Affaires Indigènes au Maroc sous Lyautey et ses successeurs. Or, Mgr Lavigerie et Adolphe Isaac Crémieux considéraient tous deux, à juste titre d’ailleurs, que les Bureaux arabes  étaient un obstacle à la colonisation, protecteurs qu'ils étaient des indigènes et de leurs biens. Crémieux dénonçait également leur peu de zèle républicain, ce corps d’élite étant effectivement largement monarchiste. Leur disparition signa l’échec de l’Algérie française.

A l’opposé de Mgr Lavigerie et de Crémieux, Lyautey ne voulut pas changer l’homme et c’est pourquoi il a réussi au Maroc. Il ne s’était en effet pas fixé pour but de donner aux Marocains d’autres ancêtres que les leurs. Il n’avait pas, comme le déclara avec arrogance le président Sarkozy dans son « discours de Dakar », l’intention de les faire « entrer dans l’Histoire », eux qui en ont une, glorieuse et ancienne.
La vision de Lyautey présentait deux caractéristiques principales qui sont l’exact contre-pied de ce que voulaient Crémieux et Mgr Lavigerie :

1) Selon lui, la colonisation n’était pas éternelle car il avait bien vu que les colonies, départements d’Algérie compris, étaient à la France, mais n’étaient pas la France. Transposée aujourd’hui cette idée permettrait de parler d’islam en France et non d’islam de France, ce qui n’est pas la même chose.
2) C’était une forme d’ « ethno-différentialisme » avant l’heure car elle n’impliquait ni assimilation, ni intégration, qui sont d’abord des pertes de substance vive pour les uns comme pour les autres. Elle ne débouchait ni sur l’acculturation républicaine, ni sur la christianisation des musulmans. Lyautey était pourtant plus que « bon » catholique, mais, tout comme Charles Maurras, il faisait la part entre le politique et le religieux. Homme de terrain, il avait tout simplement observé que les peuples du Maghreb sont « autres ».

L’histoire a donné raison à Lyautey contre Lavigerie et Crémieux. Quant à De Gaulle, s’il voyait juste quand il déclara à Jacques Soustelle que l’intégration était « un danger pour les Blancs, une arnaque pour les autres », la manière dont il s’y prit pour « soulager » la France de ce qu’il nommait « le fardeau algérien » fut à la fois odieuse par son inhumanité, honteuse par sa mise en oeuvre et criminelle par ses conséquences. D’autant plus que la victoire militaire française étant totale dès 1959-1960, des solutions autres que celle de la remise du pouvoir à la clique du FLN étaient envisageables.

Bernard Lugan

vendredi 1 juin 2012

Rwanda : à travers l’affaire dite des « missiles Mistral » Kigali veut une nouvelle fois faire chanter Paris

En écrivant dans l’édition du 1 juin 2012 du journal Libération que les forces armées rwandaises (FAR) auraient possédé des missiles Mistral, Maria Malagardis, illustre une fois de plus les grand travers de la presse française : esprit partisan, vision hémiplégique des évènements, non vérification de l’information, liberté prise avec les faits, le tout couronné par une grande incompétence. Quant au Figaro, son attitude est encore plus lamentable, puisque ses journalistes ont, par suivisme, répercuté sans la vérifier la pseudo révélation de leur consoeur. Reprise par toutes les radios et par la plupart des chaînes de télévision, cette « information » a été présentée comme susceptible de renverser ce que l’on croyait savoir sur les responsabilités concernant l’attentat du 6 avril 1994, action terroriste qui coûta la vie au président Habyarimana et qui fut l’élément déclencheur du génocide du Rwanda.

Or, et importe de le dire haut et fort, il s’agit là d’une nouvelle manipulation orchestrée par les soutiens européens du régime de Kigali. En effet :

1) Ce document est connu de tous les spécialistes depuis des années. Il a même été longuement étudié, analysé et critiqué avant d’être finalement écarté par le TPIR en raison de son inconsistance. Mais, Madame Malagardis ignore les travaux de ce tribunal qui siège depuis 1996…
2) L’information qui est à la base de ce document émane de l’association humanitaire Human Rights Watch qui, à l’époque, était une des caisses de résonance des thèses du FPR.
3) C’est à partir de cette information de HRW que le capitaine Sean Moorhouse, officier G2 (renseignement) de la Minuar, rédigea cette note qui ne fait que reprendre l’une des multiples rumeurs qui circulaient à l’époque à Kigali, l’information concernant ces missiles étant d’ailleurs considérée par lui comme improbable.
4) Depuis, ce même officier a longuement expliqué le sens de sa note, notamment aux « enquêteurs » rwandais qui rédigèrent le « rapport Mutsinzi », ce montage grossier qui était supposé démontrer la « culpabilité» française.
5) En 2011, dans une correspondance adressée à l’expert belge Filip Reyntjens, le capitaine Sean Moorhouse expliqua la genèse de ce document, mettant en évidence son caractère totalement artificiel.
6) Toutes les armes des FAR, en dehors de l’équipement individuel, avaient été placées sous séquestre par les forces de l’ONU et elles étaient entreposées dans un hangar situé à Kanombe sous la responsabilité du colonel belge Luc Marchal, adjoint du général canadien Roméo Dallaire. Nous avons la liste détaillée de ces armements. Il n’y figurait pas de missiles. Le lendemain de l’attentat, le FPR ayant repris unilatéralement les hostilités, les FAR reprirent par la force leurs armes afin de pouvoir résister à leurs ennemis.

L’affaire est donc claire, il s’agit d’un nouvel enfumage qui s’explique par trois raisons :

1) L’étau se referme chaque jour un peu plus sur les auteurs de l’attentat. Contrairement à ce que Kigali voudrait faire croire, le dossier du juge Bruguière est en effet toujours d’actualité et de nouveaux témoins acteurs qui viennent d’être entendus ou vont l’être prochainement par les juges Trévidic et Poux le confirment. Quant au rapport d’expertise qui leur fut remis, nous avons montré ses faiblesses, ses incohérences et ses erreurs dans le numéro du mois de mai de l’Afrique réelle ; les parties civiles ont d’ailleurs demandé une contre-expertise.
2) Kigali veut, par voie médiatique, faire pression sur les juges afin d’éviter la défaite judiciaire qui s’annonce.
3) Kigali a qui beaucoup perdu avec le départ de Nicolas Sarkozy n’a désormais plus d’alliés au plus haut niveau de l’Etat français. En mettant la pression sur Paris, le régime Kagamé se livre donc à un chantage auprès du nouveau régime: l’abandon de l’instruction du juge Trévidic contre la fin de la campagne anti-française.

Bernard Lugan
01/06/2012